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Mairies fermées le 31 janvier contre la réforme des retraites : en ont-elles le droit ?

Publié le 27 janvier 2023 à 13h30, mis à jour le 29 janvier 2023 à 21h50

Source : JT 20h WE

Fabien Roussel a appelé des maires à fermer le 31 janvier pour la deuxième mobilisation contre la réforme des retraites.
Un mouvement suivi par Anne Hidalgo à Paris et d’autres édiles, qui pourrait faire l’objet d’un recours devant le juge administratif.

Après le 19, une deuxième journée de mobilisation sociale est prévue mardi 31 janvier à l’appel des syndicats, contre la réforme des retraites. Et cherchant un geste fort, Fabien Roussel du PCF a appelé les mairies de France à fermer exceptionnellement pour la journée. 

Une demande déjà suivie par plusieurs maires, comme Anne Hidalgo à Paris, mais aussi ailleurs en Ile-de-France, avec les édiles de Villejuif (Val-de-Marne), de Montreuil (Seine-Saint-Denis) ou de Bonneuil-sur-Marne (Bonneuil-sur-Marne). "Je réponds à son appel. Bien sûr, il y a des services publics qui doivent continuer, je pense à l’état civil. Mais l’Hôtel de ville de Paris sera mairie solidaire le 31", a fait savoir la maire PS de la capitale sur France 2, ce qui n’a pas manqué d’être très critiqué dans l’opposition locale ou au sein du gouvernement. D’après la conseillère LR Marie-Claire Carrère-Gée, cela porterait notamment atteinte au principe de continuité du service public. 

Une continuité assurée des services publics

S’agissant de Paris, la fermeture ne concernera que l’Hôtel de ville, où deux banderoles seront affichées sur la façade avec le message "Mairie solidaire avec le mouvement social", indique la Ville à TF1info. L’ensemble des services seront clos au sein du bâtiment, à l’exception de la Halte des femmes, lieu de repos et d'hébergement pour les femmes sans abri, et de la crèche - sauf en cas de nombre trop important de grévistes. La décision de fermer les mairies d’arrondissements appartient quant à elle aux édiles d’arrondissements, indique la Ville de Paris. Une fermeture qui apparait comme un geste "purement symbolique", d’après Jean-Paul Markus, professeur de droit public et directeur du collectif de juristes Les Surligneurs.

En d’autres termes, la continuité des services municipaux ne devrait pas être réellement perturbée, d’autant que la plupart des services considérés comme vitaux ne dépendent pas de la municipalité. Par exemple, les pompiers dépendent du département, tandis que la police est rattachée à l’État. Et ces deux professions sont interdites de faire grève.

Mais une autre critique est formulée par le ministre du Travail, qui vise cette fois le principe de "neutralité". Anne Hidalgo "confond les services municipaux avec une annexe du Parti socialiste", considère Olivier Dussopt. "Le problème majeur serait que cette fermeture soit équivalente à un soutien financier aux grévistes et une atteinte à la neutralité du service public", abonde Jean-Paul Markus. "En fermant, cela permet aux agents grévistes de rester payés tout en affichant une grève." 

Ainsi, la jurisprudence a déjà sanctionné des mairies d'avoir publiquement soutenu des agents grévistes. Comme en février 1987, lorsque le Conseil d’État a annulé la décision du conseil municipal de Champigny-sur-Marne de créer "en faveur du personnel communal en grève, un fonds de solidarité" et de lui verser 50.000 francs. Le juge a considéré qu’il ne lui appartenait pas "d'intervenir dans un conflit collectif du travail en apportant son soutien financier à l'une des parties en litige".

Mais le soutien apporté ici est plus flou, prévient Jean-Paul Markus. Il n’est donc pas certain qu’un juge, s’il venait à être saisi en référé-suspension par le préfet par exemple, annule cette fermeture sur ce fondement. En effet, le maire décide de fermer en tant que responsable politique et n’est pas soumis au principe de neutralité. De plus, il faudrait prouver qu'un soutien financier a bien été apporté à des agents qui auraient fait grève. Or, à la différence des transports comme la RATP, les agents municipaux n’ont pas à déposer un préavis de grève 48 heures au préalable. Ils sont donc "indétectables" si la mairie est tout bonnement fermée. 

Dans le cas de Paris, le soutien est encore moins clair puisque la municipalité a adressé une "large invitation au télétravail des agents non grévistes". Tout en précisant qu’Anne Hidalgo "soutient le mouvement mais ne demande pas aux agents de se mobiliser ou d’être en grève, puisque cela relève des organisations syndicales et de leur responsabilité".  

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Caroline QUEVRAIN

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