Les vins et spiritueux français risquent d'être lourdement pénalisés par le rehaussement des droits de douane défendu par Donald Trump.
Ils pourraient atteindre 200%, a mis en garde le président américain, ce qui aurait un impact majeur sur les exportations de vins français, champagnes et autres cognacs.
Au sein de la filière, on s'inquiète de ces mesures qui interviennent dans un contexte déjà délicat à l'échelle mondiale.

À la mi-mars, Donald Trump a menacé la France et l'UE d’imposer des droits de douane de 200% sur les vins et spiritueux européens, en réponse aux nouveaux tarifs douaniers de 50% sur le whisky américain décidés sur le Vieux continent. Le détail de ces hausses doit être présenté en détails ce 2 avril par le président américain, à l'occasion d'un moment baptisé par Trump lui-même, le "Liberation Day". Cette perspective fait frémir d'avance les représentants des filières viticoles, pour qui les États-Unis constituent un important débouché à l'export.

Des activités qui seraient lourdement pénalisées

Outre-Atlantique, l'association professionnelle qui représente les producteurs et les distributeurs de spiritueux a mis en garde (nouvelle fenêtre) en mars les autorités. "Nous exhortons le président Trump à conclure un accord sur les spiritueux avec l'UE afin de revenir à des droits de douane nuls, ce qui profiterait au secteur de l'hôtellerie et aux distilleries artisanales américaines qui exportent leurs produits", a-t-elle publiquement déclaré. Un message comme une opposition feutrée à cette guerre commerciale que souhaite engager la Maison Blanche et que partagent les acteurs français de ces filières. 

La hausse des droits de douane aurait "pour effet de stopper nos exportations de vins et spiritueux vers les États-Unis. Ce n’est

même pas envisageable", a notamment lancé (nouvelle fenêtre) Gabriel Picard, le président de la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS). Il rappelle en passant que les Américains sont des partenaires privilégiés, "notre premier marché avec 3,8 milliards d'euros en 2024, soit 25% des exportations du secteur".

Spécialisé dans l'export de vins et de spiritueux français depuis plus de trente ans, la société Hesiode se présente en ligne comme un "ambassadeur de la viticulture française à l’international". Contacté par TF1info, son directeur général Michaël Sourice ne dissimule pas non plus ses craintes, attendant avec une certaine fébrilité les annonces de Donald Trump. "Les sancerres blancs, les chablis, ce sont des vins très plébiscités aux États-Unis, bien distribués", rappelle-t-il. Les vins rouges du bordelais ou de Bourgogne – en particulier les "belles appellations" – ne sont pas en reste. Sans oublier les cognacs, pour lesquels "il s'agit du marché numéro un", ou les champagnes. Impossible, donc, de ne pas se montrer préoccupé.

Chez Hesiode, la majeure partie de l'activité se concentre sur le commerce avec le Japon. Ce qui n'empêche pas de suivre de très près l'évolution des échanges avec les États-Unis. Dans son secteur, Michaël Sourice dit observer"des gens qui ne veulent plus acheter, car ils ont peur de voir des bateaux envoyés sur l'océan et qu'une taxation conséquente soit appliquée à l'arrivée". Une crainte légitime à ses yeux : avec des prix déjà fixés sur catalogue (et donc pas négociables à la hausse en un simple claquement de doigts), "ils redoutent des pertes" s'ils s'aventurent à importer des bouteilles venues de France ou de l'UE.

D'autres marchés déjà sous tension

Si les acteurs de l'export font grise mine, c'est aussi car le contexte économique se révèle délicat depuis quelques années. La hausse des coûts s'est accompagnée de difficultés, symbolisées par la quasi-fermeture du marché chinois. Du côté de l'empire du Milieu, on n'importe ainsi "presque plus rien depuis le Covid", glisse Michaël Sourice. Quant à Japon, avec lequel il commerce au quotidien, il s'agit d'un marché "en difficulté depuis environ deux ans". La faute à "la déflation du yen", qui entraîne des surcoûts majeurs.

Dans les médias, certains exportateurs ont expliqué ces derniers jours qu'ils avaient en début d'année effectué des ventes record aux États-Unis. Des achats préventifs, réalisés pour anticiper une hausse des coûts et qui ont permis de constituer quelques stocks outre-Atlantique. "J'ai entendu parler de hausses, oui", rapporte le dirigeant d'Hesiode, "mais si c'est positif de constituer des stocks, tout le monde sait qu'ils finissent par se tarir."  Avec, au bout du compte, un retour à la case départ.

Alors qu'à l'international, le commerce des vins et spiritueux est en berne, l'évolution des droits de douane aux États-Unis est donc synonyme de nouveaux défis. D'autant que s'attaquer à de nouveaux marchés n'a rien d'évident, au contraire. "Il sera forcément nécessaire d'essayer de développer et renforcer les échanges avec d'autres pays, mais vous n'avez aucune assurance de pouvoir compenser sur du long terme", ajoute l'entrepreneur. "À l'export, il faut beaucoup de temps pour constituer un nouveau marché, il faut tout recréer. Les relations de confiance, ça ne se noue pas du jour au lendemain."

TD

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