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Covid-19 : non, la presse irlandaise n’a pas révélé que Pfizer savait son vaccin mortel

Publié le 29 avril 2022 à 18h59, mis à jour le 30 avril 2022 à 9h16

Source : TF1 Info

Sur la base d’une vidéo, des internautes affirment que la presse irlandaise a révélé un scandale sur des effets secondaires du vaccin Pfizer.
Or, ces accusations portent sur des documents qui ne mentionnent pas les effets indésirables du sérum.
Elles ont été publiées dans un journal autoédité aux tendances complotistes et antivax.

Dans la sphère des antivax, cette publication constitue une preuve supplémentaire de la dangerosité du vaccin Pfizer contre le Covid-19. Depuis le 28 avril, une vidéo circule sur les réseaux sociaux. Elle montre une femme présenter la nouvelle édition d’un journal, The Irish Light, derrière deux hautes piles de numéros prêts à être distribués. En Une de ce numéro du mois de mai, on peut lire en anglais "Pfizer savait que ce vaccin tuerait". 

"La vérité vient directement de Pfizer"

Dénonçant les mensonges et les tromperies du laboratoire Pfizer, cette dame annonce donc des révélations dans ces pages. "Et quand les gens nous disent que nous sommes des antivax et que nous ne croyons pas que le vaccin est sûr et efficace, nous leur disons ceci : 'comment avez-vous pu introduire une substance dans votre corps, qui est fabriquée par une qui paie 2,3 milliards de dollars pour soudoyer des médecins ?' (…) La vérité est là et d’où vient-elle ? Directement de Pfizer", garantit-elle.

La vidéo a circulé autant sur Twitter que sur Telegram, avec des relais très influents comme Silvano Trotta, véritable égérie de la complosphère. Dans la majorité des cas, elle a été vendue comme source de nouvelles révélations publiées par la presse irlandaise. À l’origine, cet extrait se retrouve sur un blog : celui de Gemma O’Doherty, qui n’est autre que la femme à l’écran.

Gemma O'Doherty, ancienne journaliste et fondatrice de The Irish Light
Gemma O'Doherty, ancienne journaliste et fondatrice de The Irish Lightundefinedundefined

Cette ancienne journaliste, licenciée de l'Irish Independant en 2014 pour "conduite contraire à l’éthique", s’est depuis faite remarquer pour ses sorties complotistes et ses discours proches de l'extrême-droite. Bannie de YouTube en 2019 et de Twitter l’année suivante, Gemma O’Doherty a trouvé un nouveau support pour véhiculer ses idées. The Irish Light, lancé il y a neuf mois avec l’ancien journaliste John Waters et autoédité puis distribué gratuitement dans l'espace public. La plupart de ses contenus sont aujourd’hui tirés des pages de son édition britannique, The Light, qui existe depuis septembre 2020. Les révélations promises sont d'ailleurs tirées de l’édition anglaise d'avril, qui a publié cette Une sur Pfizer une semaine plus tôt. 

Sur le fond, que dit ce numéro ? Pas grand-chose de nouveau, à la lecture de l’article. Il revient sur des documents du groupe Pfizer, qui auraient été publiés par un juge américain. Et qui contiendraient la liste des effets secondaires graves du vaccin contre le Covid ayant pu être observés. Nous nous étions déjà penchés sur ces publications, présentées comme hautement confidentielles et explosives. Il n’en était rien : ces documents avaient été délivrés de manière conforme à la Food and Drug Administration (FDA) et ne décrivaient pas d'effets indésirables signalés, mais des problèmes potentiels pris en compte lors des essais du vaccin. Pour plus de détails sur comment cette information s’est trouvée manipulée par les opposants au vaccin, vous pouvez retrouver ici notre article sur le sujet.

Les deux dernières éditions de l'Irish Light et du Light paper, deux publications auto-éditées au contenu antivax
Les deux dernières éditions de l'Irish Light et du Light paper, deux publications auto-éditées au contenu antivax - DR

Par ailleurs, le fait que cela soit présenté comme des révélations sorties dans la presse irlandaise est tout aussi faux. Si The Irish Light se vante d’être un "journal indépendant", il est un véritable relai des thèses antivax et conspirationnistes sur la pandémie. Comme a pu le décrire The Irish Independant (l’ancien journal de Gemma O’Doherty, donc), la publication a des cibles privilégiées comme Bill Gates ou Pfizer, rapporte le nombre de décès qu’aurait provoqué la vaccination dans le monde et tient des propos violents en appelant par exemple à des "procès de Nuremberg" pour les journalistes. 

Pour des chercheurs de la Harvard Kennedy School, l’école d’administration publique de l’université américaine, les sujets discutés dans ces publications sont cependant divers et se tiennent à un format traditionnel. Ce qui a pour effet de brouiller les cartes et d'ajouter à la désinformation. D'après eux, "les théories du complot liées au Covid-19 sont incluses aux côtés d'une gamme d'autres contenus non complotistes et que les lecteurs rencontrent ces idées dans un format qui ressemble étroitement à un journal conventionnel". 

Pourtant, ce sont ses positions complotistes et les "scoops" qu’il publierait qui lui valent d’être cité par la sphère Qanon. Et tout en même temps d’être remarqué par la presse traditionnelle. Fin 2020, The Guardian était revenu sur une fausse information créée de toutes pièces et reprise par The Light. L’édition britannique affirmait alors que la pandémie était un canular.

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Caroline QUEVRAIN

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