La patronne des députés RN a été reconnue coupable de détournements de fond publics et condamnée ce lundi à quatre ans de prison, dont deux ferme, ainsi que cinq ans d'inéligibilité immédiate.Cette annonce coup de tonnerre pourrait bien mettre en péril ses ambitions présidentielles pour 2027.Marine Le Pen va faire appel, enclenchant une bataille judiciaire dont l'issue est encore inconnue.
La fin d'un long suspense. Dans un climat de très haute tension, le tribunal correctionnel de Paris a livré ce lundi 31 mars son jugement dans l'affaire des assistants parlementaires européens. La cheffe de file des députés RN Marine Le Pen a été condamnée (nouvelle fenêtre) à quatre ans d'emprisonnement dont deux ferme, aménagés sous bracelet électronique, mais surtout à une peine de 5 ans d'inéligibilité immédiate, c'est-à-dire qui prend effet même en cas d'appel. Un coup de tonnerre pour la leader d'extrême droite, qui pourrait bien à ce stade l'empêcher de participer à la course à l'Élysée pour 2027.
Reconnue coupable de détournement de fonds, en particulier d'enveloppes de l'Union européenne au profit de son parti, la députée du Pas-de-Calais va faire appel (nouvelle fenêtre), a d'ores et déjà annoncé son avocat, Me Rodolphe Bosselut, qui a fustigé un "coup à la démocratie". Depuis des semaines, la patronne des députés RN avait mis en garde qu'une condamnation à une longue période d'inéligibilité signerait sa "mort politique" (nouvelle fenêtre). Est-elle pour autant privée de toute candidature lors du prochain scrutin présidentiel ?
Une décision finale connue "pile au moment de la présidentielle" ?
Si l'on s'en tient aux délais classiques de la justice pour les appels, la finaliste des deux dernières présidentielles ne devrait pas être fixée sur son sort avant un long moment : "il faut compter en général entre un et un an et demi pour qu'un procès en appel se tienne", explique à TF1info Mélody Mock-Gruet, docteure en droit public et enseignante à Sciences-Po.
Suite à cette audience, l'élue d'extrême droite pourrait voir sa peine d'inéligibilité immédiate levée, mais cela n'est pas garanti (nouvelle fenêtre). Si sa condamnation est confirmée, elle pourra retenter sa chance en décidant d'enclencher un pourvoi devant la Cour de cassation. Mais dans ce cas-là, le délai s'allonge encore. Il faut compter six mois à un an de plus, avant d'arriver à une décision de justice définitive. "En bref, on pourrait aller jusqu'à deux ans ou deux ans et demi de procédure, et l'on arriverait pile au moment de la présidentielle", résume l'experte. Le scrutin est en effet traditionnellement organisé en avril, soit dans un peu plus de deux ans.
La préparation d'une candidature dans ces circonstances paraît bien délicate (nouvelle fenêtre) : en fonction de l'avancée de la procédure judiciaire, il serait en effet possible que le rendu du jugement se télescope avec les échéances électorales (nouvelle fenêtre) de campagne. Par exemple, le recueil de 500 parrainages, étape obligatoire pour pouvoir se présenter au scrutin présidentielle, commence dix semaines avant la date du premier tour. Difficile d'imaginer Marine Le Pen commencer à rassembler ces signatures avant même d'avoir été fixée définitivement sur son sort.
La possibilité d'une audience en appel rapprochée
Pour éviter un tel imbroglio, serait-il possible que la procédure judiciaire soit accélérée ? "Le parquet pourrait demander à audiencer dans les prochains mois", en faisant valoir une "urgence démocratique" (nouvelle fenêtre), explique la spécialiste. "Dans ce scénario, Marine Le Pen pourrait être rejugée en appel au mois de septembre", avance-t-elle. Pour l'heure, cela reste seulement une hypothèse, mais "c'est faisable juridiquement", insiste l'experte.
En gardant tout de même à l'esprit que même si l'audience est rapprochée, elle peut malgré tout confirmer la peine d'inéligibilité. "En résumé, nous n'en sommes qu'à la première étape d'un parcours judiciaire", soulève la spécialiste. Si bien que l'"on peut s'interroger sur la réalité des propos" de Marine Le Pen, lorsque celle-ci brandit le spectre de sa "mort politique".
Si Marine Le Pen épuise tous ces recours judiciaires et que son inéligibilité est confirmée, la cheffe de file des députés RN sera bien obligée de renoncer à ses ambitions présidentielles (nouvelle fenêtre). Mais pas forcément à celles d'entrer au gouvernement. Lui restera en effet la possibilité d'envoyer un autre candidat à sa place dans la course à l'Élysée, le patron du RN Jordan Bardella par exemple, pour que celui-ci la nomme ensuite Première ministre, en cas de victoire. "En termes juridiques, cela ne pose pas de difficulté", note Mélody Mock-Gruet. Autant de scénarios restant toutefois encore très hypothétiques à l'heure actuelle.
En attendant, peut-elle rester députée ?
Quant à son mandat de députée enfin, Marine Le Pen pourra le conserver, car le Conseil constitutionnel refuse de retirer ce mandat aux élus nationaux condamnés à une peine d'inéligibilité, tant que la décision n'est pas définitive. En revanche si l'Assemblée nationale est de nouveau dissoute dans les mois à venir elle ne pourra pas se représenter, du moins tant que la condamnation n'a pas été levée en appel. Elle devrait en revanche perdre dès maintenant son mandat de conseillère départementale du Pas-de-Calais.
L'élue a également été condamnée à une peine d'emprisonnement de deux ans ferme, à purger avec un bracelet électronique. Mais cette mesure n'entre pas en application pour le moment : sa mise en œuvre est suspendue par un appel. Elle ne sera donc effective qu'une fois que la décision sera définitive.
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