Les jeunes sont de plus en plus des "enfants d'intérieur", déplore le Haut Conseil de la famille dans un récent rapport.
Élevés entre quatre murs, ces derniers sont de plus en plus coupés de la nature, avec des effets non négligeables sur leur développement et leur santé.
Selon l'instance, plusieurs facteurs sont à l'origine de l'émergence de cette "culture de la chambre".

Des mineurs élevés entre quatre murs et coupés de la nature. C'est, en substance, ce qui caractérise la génération des "enfants d'intérieur", qui inquiète le Haut conseil de la famille de l'enfance et de l'âge (HCFEA), dans un rapport publié mardi et consacré à la place des enfants dans "les espaces publics et la nature".

"En à peine une génération, on est passé du 'c'est bon de sortir pour les enfants' à des 'enfants d'intérieur'," a détaillé lors d'une conférence de presse Sylviane Giampino, la présidente de cette instance rattachée à Matignon. Espace extérieur perçu comme risqué par les parents, aménagement urbain pas assez adapté aux enfants, crise sanitaire... plusieurs facteurs ont contribué à forger une "culture de la chambre", avec des conséquences non négligeables sur le développement et la santé des plus jeunes, pointent les auteurs.

L'extérieur perçu comme un danger

"Il y a une génération, on se félicitait de sortir les enfants et on leur proposait de fréquenter camarades et voisins dehors. Aujourd'hui quand ils sont en extérieur, on tend à les voir comme délaissés ou en danger", observe encore la présidente du HCFEA auprès de l'AFP.  

Peur de la mauvaise rencontre, de l'accident, danger des véhicules motorisés... l'espace extérieur est perçu comme risqué pour les enfants observent les auteurs de ce rapport qui mentionnent notamment des "trottoirs étroits et encombrés, mal entretenus ou inexistants" et des voies sans éclairage. "Les temps de présence dans les espaces publics sans l'accompagnement d'un adulte et de jeu à l'extérieur ont diminué au profit d'endroits privés et clos, et d'activités encadrées et sédentaires", poursuivent ces derniers. À titre de repère, quelque 77% des collégiens sont accompagnés pendant leur trajet école-domicile, 60% des trajets domicile-école des enfants et adolescents se font en véhicule motorisé (32% en voiture) contre 38% à pied et 2% à vélo, relève l'instance.

La ville pas assez pensée à hauteur d'enfant

Appelant à repenser la ville à hauteur d'enfant, le Haut Conseil de la famille déplore notamment que les normes et réglementations restreignent ou interdisent les jeux (de ballon, de glisse...), l'exploration de l'espace et l'expérimentation des risques, indispensables au développement de l'enfant. Les besoins des enfants sont "peu pris en compte lors de l’aménagement des espaces et des territoires", selon l'instance qui cite par exemple la disparition des cours d'immeubles.

Dans son rapport de 252 pages, le Haut conseil recommande en conséquence d'"ouvrir la ville aux enfants" et recense des bonnes pratiques de villes qui se mettent à hauteur d'enfant, en France et à l'étranger. Tout en recommandant de faire participer les enfants aux projets d'aménagement urbains, l'instance suggère ainsi de nombreuses mesures, comme végétaliser les cours d'école, développer parcs, promenades plantées, jardins partagés, et laisser place au naturel dans la ville (friches, mares...). Parmi les suggestions, figure aussi le projet de "ville verte du quart d'heure", à savoir la ville où un espace vert est accessible à un quart d'heure à pied.

Un repli sur la maison aux multiples conséquences

Confinement, restrictions de mobilité, fermeture des classes, lieux sportifs et culturels... la crise du Covid a contribué à renforcer encore cette "culture de la chambre", où se passent désormais les amitiés par les réseaux sociaux et les distractions (jeux, films et vidéos). Le rapport souligne également qu'un enfant sur cinq a des parents qui travaillent le weekend, pourtant traditionnellement jour privilégié des sorties en famille et à l'extérieur.

Or, les effets de ce repli sur la maison ne sont pas sans conséquences, pointe le rapport qui souligne notamment que moins habitués à la nature, les enfants risquent d'être moins sensibilisés à son importance. "Les enfants sortent de moins en moins et consacrent moins de temps à jouer dans la nature", écrivent à ce sujet les auteurs, évoquant une "extinction de l’expérience de la nature" ou "amnésie environnementale". 

Huis clos domestique, perte de lien social et intergénérationnel, consommation excessive des écrans, problèmes de santé mentale, manque d'activité physique, obésité... les risques auxquels s'expose cette nouvelle génération sont multiples, énumère le rapport. Pour rappel, la France se positionne au 22e rang des 25 pays les plus riches en matière d’activité physique des adolescents de 11 à 17 ans, selon une étude parue en 2020 dans le Lancet.

Audrey LE GUELLEC avec AFP

Sur le
même thème

Tout
TF1 Info