Le Rassemblement national incite ses électeurs à aller voter aux législatives pour faire de Jordan Bardella le nouveau Premier ministre.
Si le président de la République garde la main sur la nomination de son chef de gouvernement, la pratique est plus nuancée.

"Si les Français nous font confiance, Jordan Bardella sera Premier ministre." Cette promesse formulée par Marine Le Pen au 20H de TF1 deviendra-t-elle réalité après le 7 juillet ? C’est en tout cas le pari du Rassemblement national (RN) pour mener sa campagne des législatives. Preuve en est avec la publication d’une affiche sur le compte X du parti, dès le lundi 10 juin, avec la formule suivante : "Jordan Bardella Premier ministre. Votez le 30 juin et le 7 juillet !" C’est donc acté : l’eurodéputé réélu se voit bel et bien à Matignon.

Prévu par l'article 8 de la Constitution

Mais que disent les textes, si le RN sort vainqueur des élections législatives et obtient la majorité ? En théorie, le président de la République garde bien la main sur le nom de son chef de gouvernement. Ainsi, l'article 8 de la Constitution (nouvelle fenêtre) dispose que "le président de la République nomme le Premier ministre". Ce que confirme à TF1info Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public à l’université de Poitiers et membre des Surligneurs : "D’un strict point de vue juridique, au lendemain des législatives, Emmanuel Macron peut nommer qui il veut, peu importe la composition de l’Assemblée nationale." 

Si rien n'oblige le chef de l'État à nommer le responsable du parti vainqueur des élections législatives, dans la pratique, les choses sont plus compliquées. En ne désignant pas une personnalité reflétant la composition de la nouvelle Assemblée - aux couleurs du RN dans le cas étudié ici - élue le 7 juillet, Emmanuel Macron se heurterait à un blocage parlementaire. La nouvelle majorité ne voterait pas les textes proposés par le gouvernement. Et si le président décide tout de même de gouverner par voie réglementaire (par décret), ses ministres risquent d’être renversés par une motion de censure.

Un choix souvent imposé par les partis

Pour que le pays continue de fonctionner, Emmanuel Macron n’a donc d’autre choix que de nommer une personnalité issue de cette nouvelle majorité. Et le profil de Jordan Bardella s’impose, étant offert par son camp sur un plateau. "Si le RN obtient la majorité absolue, Jordan Bardella, en tant que responsable du RN, sera très probablement plébiscité. Emmanuel Macron est juridiquement libre, mais n’aura aucune marge de manœuvre politiquement", souligne Bertrand-Léo Combrade. Une hypothèse qui vaut pour le RN, mais aussi pour la gauche si elle parvient à remporter les législatives et à s’entendre sur le profil d’un Premier ministre. 

Les précédentes cohabitations montrent d'ailleurs que le nom du nouveau chef du gouvernement a toujours été décidé par les partis devenus majoritaires. "En 1986, François Mitterrand nomme Jacques Chirac qui est le candidat plébiscité par la nouvelle majorité de l’Assemblée nationale", développe le constitutionnaliste. "En 1993, le choix d’Edouard Balladur a été imposé politiquement à François Mitterrand. En 1997, la gauche plurielle gagne les législatives et Jacques Chirac nomme Lionel Jospin, candidat plébiscité là encore par la nouvelle majorité." 

Dans ce cas particulier d'une cohabitation, qui serait la quatrième de la Vᵉ République (nouvelle fenêtre), c'est le Premier ministre qui devient le véritable décideur, selon Bertrand-Léo Combrade. "C’est lui qui gouverne. Le président n’a plus de majorité : il est débranché et n’a quasiment plus aucune marge de manœuvre."

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Caroline QUEVRAIN

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