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Clément Viktorovitch : "le combat contre les fausses informations est à armes inégales"
Clément Viktorovitch : "la rhétorique est un pouvoir que nous exerçons sur les autres"
ISA HARSIN/SIPA

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Clément Viktorovitch : "le combat contre les fausses informations est à armes inégales"

Grand entretien du jeudi

Propos recueillis par

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Clément Viktorovitch est docteur en sciences politiques et chroniqueur à France info. Il enseigne la rhétorique et la négociation à Sciences Po depuis plus de 10 ans. Au Seuil, il vient de faire paraître « Le Pouvoir rhétorique », livre érudit sur le sujet mais aussi manuel pour tous ceux qui souhaitent utiliser plus efficacement le langage.

Marianne : Vous écrivez, à propos de la rhétorique, « qu’il est difficile d’établir une distinction claire entre les procédés qui relèvent de la conviction, et ceux qui tombent dans la manipulation ». Pourquoi cela ?

Clément Viktorovitch : La rhétorique a encore mauvaise réputation. Regardons les choses en face : lorsque quelqu’un vous accuse de « faire de la rhétorique », il s’agit rarement d’un compliment. Cette mauvaise réputation n’est pas toujours usurpée. Il existe, en effet, des points de convergence entre rhétorique et manipulation. La rhétorique, c’est l’art de convaincre. La manipulation, elle, désigne les procédés permettant d’exercer une influence sur notre interlocuteur, sans que celui-ci ne puisse s’en défendre. Nous lui retirons, en quelque sorte, une partie d’une liberté essentielle : celle de ne pas être d’accord avec nous. Cette distinction posée, il nous faut bien remarquer que la rhétorique peut être manipulatoire. Elle peut mobiliser un ensemble de procédés trompeurs, frauduleux ou fallacieux, qui égarent ou neutralisent les facultés critiques des auditeurs. Or, cette frontière, entre rhétorique et manipulation, est beaucoup plus trouble que ce que l’on croit. L’utilisation des émotions, par exemple, permet de susciter de nécessaires prises de conscience. Mais elles peuvent également, si elles deviennent trop intenses, saturer les capacités critiques des personnes auxquelles nous nous adressons. Comment déterminer où se situe la limite entre les deux ? La réponse est simple : nous ne le savons jamais vraiment.

Est-ce que c’est ambiguïté de principe disqualifie pour autant la rhétorique ? Dans quelle mesure doit-elle s’accorder avec l’éthique ?

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne