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Face à l'augmentation des prix de l'énergie et des matières premières, les baguettes de pain pourraient atteindre les 1,50 euro dans les prochains mois.
Face à l'augmentation des prix de l'énergie et des matières premières, les baguettes de pain pourraient atteindre les 1,50 euro dans les prochains mois.
Magali Cohen / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Inflation : les boulangers pourront-ils éviter de facturer la baguette 1,50 euro ?

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Face à l’augmentation du coût de l’énergie et des matières premières, les boulangeries françaises pourraient (à nouveau) revoir le prix de leur baguette au cours des prochains mois. Particulièrement touchées, les structures moyennes qui ne sont pour le moment pas concernées par le bouclier tarifaire.

Alors que l’Hexagone traverse une crise énergétique sans précédent et que l’inflation se poursuit, le prix du pain pourrait de nouveau être affecté. En un an, la baguette classique – qui était vendue 90 centimes d’euros – a pris 5 centimes en moyenne et se rapproche petit à petit du 1 euro symbolique, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Mais c’est une hausse encore plus importante que les boulangers craignent désormais : la baguette pourrait coûter 1,50 euro dans les prochains mois.

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Si l’augmentation du prix de la farine de blé – de 30 % en un an – y est bien pour quelque chose, elle n'est pas seule responsable de cette flambée des prix en boulangerie. « La part du blé dans le prix de la baguette est marginale, elle représente 10 à 15 centimes maximum, explique à Marianne Philippe Chalmin, économiste et spécialiste des marchés de matières premières. Le problème n’est pas le blé mais l’énergie qui est utilisée par les fours électriques très énergivores des boulangeries. »

Aides ciblées

Car, si les prix de l’énergie – de l’électricité et du gaz notamment – ont légèrement baissé ces dernières semaines, les boulangers appréhendent l’arrivée de l’hiver tout comme l’évolution du conflit en Ukraine. « Les évènements imprévus comme ce qu’il s’est passé hier avec les fuites des gazoducs Nord Stream ne sont pas de bon augure. Ils peuvent rapidement entraîner une hausse des prix de l’énergie » estime Thierry Pouch, économiste et chef du service études des Chambres d’agriculture de France. Ce qui ajoute un stress supplémentaire aux artisans boulangers qui pâtissent aussi de la flambée des prix des autres matières premières – papier, beurre mais aussi lait et œufs – nécessaires pour leurs pâtisseries, et des salaires des employés. « Le prix du pain est fixé en fonction des charges globales de la boulangerie » ajoute l’économiste.

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Pour pallier les difficultés rencontrées par les boulangers, le gouvernement a reconduit son dispositif de bouclier tarifaire pour l’énergie. L'an prochain, la hausse des tarifs de gaz et d'électricité sera limitée à 15 %, pour les petites entreprises et les ménages. Sauf que, pour bénéficier de cette aide, l’entreprise doit compter moins de dix salariés mais aussi être dotée de compteurs électriques d’une puissance maximale de 36 kilovoltampères (KVA). « Seules les petites boulangeries sont donc aidées par le gouvernement, ce qui pose problème pour les structures moyennes. Notre syndicat a donc demandé au gouvernement que le bouclier tarifaire s’applique à toutes les entreprises utilisant des compteurs d’une puissance maximale de 80 KVA » expose Sébastien Doley, secrétaire général du Syndicat des Boulangers du Grand Paris.

« Tendance baissière »

L'économiste Philippe Chalmin voit tout de même un avantage à cette application stricte du bouclier tarifaire… Car, dans les entreprises de plus de dix salariés, on compte de toute évidence la grande distribution, qui, pour lui « n’est pas à plaindre ». Outre le fait que son pain est industriel, ces chaînes ont toujours la possibilité de compenser la hausse de leurs charges globales sur d’autres produits. « Certes, des aides supplémentaires pourraient être mises en place par le gouvernement afin d'alléger les charges sociales sur les salaires ou sur la TVA par exemple » mais le plus important est « de réguler les prix de l’énergie. Pour les entreprises moyennes, des factures multipliées par trois ou quatre, ce n’est pas tenable », renchérit Sébastien Doley.

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Si la perspective d’une baguette à 1,50 euro est encore lointaine, elle n'est pas illusoire dans un contexte d'inflation, d'après les experts interrogés par Marianne. Se pose ainsi la question de savoir si les Français seront toujours prêts à acheter du pain à ce prix-là. Car même si cet aliment fait partie intégrante de cuisine française, « il y a une tendance baissière de la consommation alimentaire depuis un an », admet Thierry Pouch. Et donc le risque que les consommateurs – dont le pouvoir d’achat diminue – se tournent vers la grande distribution. Ce qui fragiliserait davantage les artisans boulangers…

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne