Après la trilogie des « Enfants du désastre », dont le premier tome, « Au revoir là-haut », lui a valu le prix Goncourt en 2013, Pierre Lemaitre s’est lancé, en suivant le cours de l’histoire, dans une seconde trilogie intitulée « Les Années glorieuses ». « Le Grand Monde » a paru il y a tout juste un an, « Le Silence et la Colère », qui lui fait suite, vient de sortir.
La famille Pelletier, par un artifice du récit, est bien dans la filiation des Enfants du désastre : on a appris dans Le Grand Monde, paru l’an dernier, que Louis Pelletier était en fait l’Albert Maillard d’Au revoir là-haut, escroc en monuments funéraires. Pierre Lemaitre descend le fil de l’histoire et peut-être un jour arrivera-t-il jusqu’à nous, renonçant au roman historique pour entrer directement dans le roman de mœurs. Le Grand Monde se déroulait dans le dernier trimestre de 1948, entre le Liban, Paris et surtout l’Indochine, où le Viêt-Minh harcelait les Français – et de temps en temps les découpait à la machette ou les écorchait vifs (encore que Lemaître ait la main assez légère dans ces récits de tortures). Le Silence et la Colère se passe dans le premier trimestre de 1952 : les deux fils événementiels tournent autour de la mise en eau d’un barrage qui noiera une bourgade, et d’un problème d’avortement.