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C'est finalement ce lundi 30 octobre que s'ouvre à Paris le procès de douze hommes mis en cause pour un projet d'attentat pendant la campagne présidentielle de 2017.
C'est finalement ce lundi 30 octobre que s'ouvre à Paris le procès de douze hommes mis en cause pour un projet d'attentat pendant la campagne présidentielle de 2017.
Hans Lucas via AFP / Xose Bouzas

"Il faut les rafaler": début du procès d'un projet d'attentat islamiste pendant la présidentielle 2017

Radicalisation

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Le procès de douze hommes pour un projet d'attentat déjoué pendant la campagne présidentielle de 2017 débute à Paris ce lundi 30 octobre. Les deux principaux accusés, qui avaient tenté de faire allégeance à l'État islamique, Clément Baur et Mahiedine Merabet, avaient notamment pour cibles François Fillon et Marine Le Pen.

Il devait se tenir au début de l'année mais avait été renvoyé au bout de quelques jours… faute de magistrats disponibles. C'est finalement ce lundi 30 octobre que s'ouvre à Paris le procès de douze hommes mis en cause pour un projet d'attentat pendant la campagne présidentielle de 2017. Tout repart de zéro donc, pour les deux principaux accusés qui devront répondre de leurs actes devant les juges de la cour d'assises spéciale jusqu'au 1er décembre. Il s'agit de Clément Baur et Mahiedine Merabet, respectivement âgés de 30 et 36 ans aujourd'hui. À leurs côtés, dix autres hommes – dont neuf comparaissent libres – sont également soupçonnés d'avoir aidé le duo à se procurer armes et munitions. Ils seront jugés pour association de malfaiteurs terroriste.

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Le 18 avril 2017, après plusieurs jours de traque, Clément Baur et Mahiedine Merabet étaient interpellés à Marseille – soit à peine cinq jours avant le premier tour de la présidentielle. Les enquêteurs de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) avaient finalement réussi à localiser la planque de ces derniers. Les deux hommes, qui se sont connus en prison, avaient précipité leur chute en cherchant à contacter, via la plateforme Telegram, le groupe État islamique (EI) pour lui transmettre une vidéo d'allégeance et de revendication. Mais, c'est chez un agent infiltré de la DGSI que leur vidéo avait atterri…

Photo de Fillon, meeting de Le Pen

Cette dernière montrait des dizaines de munitions disposées sur une table de manière à écrire « la loi du talion », au côté d'un fusil-mitrailleur, d'un drapeau de l'EI et la Une du Monde du 16 mars 2017 avec une photo du candidat de droite François Fillon, suivie d'un montage d'enfants victimes de bombardements en Syrie. La perquisition de leur planque avait permis de saisir le fusil-mitrailleur Uzi de la vidéo, trois pistolets, des centaines de munitions et un sac de boulons.

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Sur place, les enquêteurs avaient également découvert plus de 3,5 kg de TATP – un explosif instable prisé des jihadistes et déjà utilisé lors des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis. L'exploitation des supports numériques a mis en évidence des recherches internet tous azimuts sur de potentielles cibles : des clubs libertins, des bars, un restaurant casher et… un meeting de Marine Le Pen à Marseille, prévu le 19 avril.

Au cours de l'instruction, le délinquant multirécidiviste de Roubaix (Nord) Mahiedine Merabet a contesté tout projet d'attentat meurtrier. Ce dernier a toutefois admis avoir envisagé « un coup d'éclat » en faisant exploser une grenade artisanale à proximité du meeting de la candidate du Rassemblement national (RN). Mais pour « faire peur », en excluant de s'en prendre à des civils. Par ailleurs, pendant le procès avorté de janvier, il s'est présenté comme un « prisonnier politique musulman ».

Parcours atypique

Clément Baur, qui a assumé son appartenance idéologique à l'EI, a assuré qu'il ne voulait causer que des « dégâts matériels » sur des cibles institutionnelles, en représailles aux frappes en Syrie. Les conversations interceptées à son insu lors de ses parloirs en prison sont plus fructueuses : « Baghdadi il a raison, déclarait-il notamment à propos de l'ex-chef de l'État islamique. Il faut pas parler avec eux, il faut juste les rafaler, les exploser. »

Son parcours est pour le moins atypique : né dans le Val-d'Oise, il se serait converti à l'islam à 14 ou 15 ans au contact de la communauté tchétchène de Nice, où il vivait avec sa mère. Il a appris le russe en autodidacte, puis l'arabe. À 17 ans, il part en Belgique où il demande l'asile sous une première fausse identité. Expert de la dissimulation, il déposera d'autres demandes d'asile en France et en Allemagne, se faisant passer pour un réfugié tchétchène. C'est précisément pour avoir détenu de faux papiers qu'il sera incarcéré quelques semaines à Lille, où il rencontrera un certain… Mahiedine Merabet.

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En décembre 2016, les deux hommes étaient entrés dans la clandestinité, après la perquisition administrative du domicile de ce dernier, où se trouvait Clément Baur sous un nom d'emprunt. Les enquêteurs sont convaincus qu'au cours de son sinueux parcours, Clément Baur a fréquenté la cellule terroriste de Verviers en Belgique – celle d'Abdelhamid Abaaoud, chef opérationnel des commandos du 13-Novembre –, et qu'il a été en contact en Allemagne avec Anis Amri, l'auteur de l'attentat au camion sur le marché de Noël de Berlin en 2016, qui avait causé douze morts.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne