Dans son essai « L’Europe, ennemie de la République ? », l’économiste et ancien homme politique Liêm Hoang-Ngoc met au jour les déséquilibres et les failles de la construction européenne dans une perspective à la fois historico-politique et économique. Un livre nuancé qui n'hésite pas à faire l’inventaire des côtés positifs de l'Union européenne (UE), rendant les critiques de celle-ci d’autant plus pertinentes.
Marianne : Vous écrivez dans votre essai que « les textes européens légitiment de véritables politiques de classe qui se dissimulent sous un jargon ». Est-ce le cas depuis le début de la construction européenne ?
Liêm Hoang-Ngoc : C’est surtout le cas depuis l’entrée en vigueur de la monnaie unique. Les ajustements par le taux de change des monnaies nationales ne sont plus possibles, puisque celles-ci sont remplacées par l’euro, qui garantit une certaine stabilité monétaire. Mais, comme les politiques budgétaires sont strictement encadrées par le Pacte de stabilité (qui limite les déficits et taux d’endettement publics) et que le budget européen est limité, le seul mécanisme permettant aux pays en difficulté de « s’ajuster » est la « dévaluation interne », synonyme, dans le jargon bruxellois, de « modération salariale », de « consolidation budgétaire » et de « réformes structurelles ».
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