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La maison de la radio et de la musique, à Paris.
La maison de la radio et de la musique, à Paris.
Hans Lucas via AFP

Livres : France Culture et Arte lancent leur prix de l’essai… et de l’entre-soi

Tambouille

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Ce 29 novembre, les deux partenaires remettent la première édition d’un prix dont les ouvrages ont été sélectionnés par un jury… d’éditeurs.

Nouveau prix… vieilles habitudes ? Six essais sont en lice pour remporter le prix de l'Essai de France Culture et Arte : Manon Garcia , La conversation des sexes (Flammarion), Estelle Zhong Mengual, Apprendre à voir (Actes Sud), Pascal Chabot, Avoir le temps (PUF), Charles Stépanoff, L’animal et la mort (La Découverte), Yaëlle Amsellem-Mainguy, Les filles du coin (Presses de Sciences Po), et Barbara Glowczewsky, Réveiller les esprits de la terre (Dehors). Le 29 novembre, à 10 h 45 pétantes, en direct de la Maison de la radio et de la musique, Sandrine Treiner (France Culture) et Boris Razon (Arte) remettront la récompense à l’heureux essayiste de l’année. S’il n’est pas doté, l’élu bénéficiera d’une visibilité soutenue sur les deux médias.

Un nouveau prix pour un parent pauvre de l’édition, alors que c’est la littérature qui prend toute la lumière des médias et de la librairie, c’est louable. Mais… surprise ! Derrière le jury de 8 « personnalités » de la station culturelle et de la chaîne franco-allemande, s’en cache un autre, décisif puisqu’il a orienté et décidé des six ouvrages sélectionnés. Or ce jury de présélection est composé entièrement d’éditeurs spécialisés dans la non-fiction et les sciences sociales ! « Paritaire » comme insiste le service de presse de Culture, certes, mais « renouvelable tous les 3 ans », soit un rond de serviette triennal pour faire la pluie et le beau temps. On ne lit pas dans les rédactions de France culture et d’Arte ?

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Il fallait y penser, à l’heure où le chroniqueur du « Masque et la Plume », Arnaud Viviant, dans son excellent précis, Cantique de la critique (La Fabrique), déplore que le Post-it « coup de cœur » du libraire remplace désormais la parole jupitérienne mais autorisée des journalistes spécialisés. Pourquoi tout compliquer et se prendre la tête en effet, laissons décider les producteurs eux-mêmes. On y trouve un petit gratin d’entre-soi : Stéphane Durand (Actes Sud), Amélie Petit (Premier Parallèle), Chloé Pathé (Anamosa), Christophe Bataille (Grasset), Maxime Catroux (Flammarion), Stéphanie Chevrier (La Découverte) et Séverine Nikel (Seuil).

Cuisines internes

Les critères de sélection parmi des milliers de livres ne sont pas précisés. « Car nous faisons confiance à leur jugement, ce sont eux qui connaissent le mieux ce qui se fait en matière de non-fiction », nous répond-on avec une belle ingénuité au service de presse. Et de préciser qu’« évidemment un juré ne peut sélectionner un essai issu de sa propre maison d’édition ». Certes. Mais dans cette première sélection, on note deux ouvrages de deux éditeurs sélectionneurs, La Découverte et Actes sud.

Les observateurs étrangers ne cessent de se gausser des cuisines internes des prix littéraires français, adeptes de l’andouillette et des plats canailles, des tambouilles d’entre-soi et de la « corruption sentimentale » comme le disait le meilleur d’entre-eux, feu l’académicien Goncourt François Nourrissier . France Culture maintient bien haut la tradition !

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne