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Les territoires perdus de la restauration
"N’étant sanctionné que dans de très rares cas, l’abandon de poste est devenu monnaie courante dans l’hôtellerie."
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Les territoires perdus de la restauration

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Alerte ! Les patrons s’apprêtent à jeter l’éponge. Le secteur est mourant. Et ce n’est pas (que) le Covid qui va le tuer.

Ils y sont parvenus. À force de saper les fondements de notre société, l’idéologie du droit sans devoir est parvenue à faire de l’assistanat une fin en soi. Dans sa grande majorité, car il reste encore des résistants, l’enseignement hôtelier forme des experts en durée légale minimale de travail passés maîtres dans l’art d’accepter un emploi le temps nécessaire pour toucher le chômage. Une fois la période de farniente écoulée, on rempile quelques mois, sans aucune difficulté – puisque la demande est massive –, et l’on renouvelle l’opération. Le plan de carrière est remplacé par le plan de chômage. N’étant sanctionné que dans de très rares cas, l’abandon de poste est devenu monnaie courante dans l’hôtellerie, puisque le licenciement qu’il implique ouvre le droit aux allocations, au contraire de la démission.

Tendance

La pratique est devenue tendance, et la classe politique l’ayant favorisée s’incline. Autant dire que l’on s’arrache les porteurs de conscience professionnelle, mus par une vocation sincère, qui deviennent des cuisiniers ou des maîtres d’hôtel exemplaires. Ceux-là ne pèsent au mieux qu’un quart des effectifs, les autres s’étant engagés dans cette voie par dépit. On entend encore très souvent des profs lancer à la figure de leurs élèves en difficulté, « toi t’es bon pour le lycée hôtelier »… Cinquante-trois ans plus tard, Mai 68 fait encore des petits, assimilant les métiers du service à de la servitude. Sous le plat, la plage. Les patrons jettent donc l’éponge, le fourneau et l’assiette, avant de tirer le rideau. Des territoires perdus qui deviennent le vrai visage de la France. La « fabrique du crétin » annoncée en 2005 par Jean-Paul Brighelli se porte bien, le guide Michelin pourrait même lui accorder trois étoiles.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne