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Une patrouille ukrainienne près de Bakhmout.
Une patrouille ukrainienne près de Bakhmout.
Evgeniy Maloletka/AP/SIPA

"Bakhmout va tomber", redoutent les soldats ukrainiens engagés dans la bataille la plus symbolique de la guerre

Ville forteresse

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Alors que l'armée russe poursuit son offensive autour de Bakhmout, dans l'est de l'Ukraine, l'armée ukrainienne reconnaît une situation « extrêmement tendue » autour de cette ville devenue le symbole des combats ces derniers mois.

L'armée ukrainienne a fait état ce mardi 28 février d'une situation « extrêmement tendue » autour de Bakhmout, à l'épicentre des combats dans l'est de l'Ukraine, où les troupes russes ont gagné du terrain ces dernières semaines. Elles tentent désormais d'encercler cette ville qui comptait 70 000 habitants avant l'invasion du pays par la Russie en février dernier. Malgré son faible intérêt stratégique, Bakhmout est devenue un symbole politique de la lutte pour le contrôle de la région industrielle du Donbass. Volodymyr Zelensky, qui s'était rendu sur place en décembre, avait juré de défendre cette ville forteresse « aussi longtemps que possible ». Mais, ce lundi 27 février, dans son message quotidien, le président ukrainien a toutefois reconnu que « la situation devient de plus en plus compliquée ». « L’ennemi détruit systématiquement tout ce qui peut être utilisé pour protéger nos positions », a-t-il ajouté, qualifiant de « vrais héros » les soldats ukrainiens engagés dans cette bataille.

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Selon le commandant des forces terrestres ukrainiennes, Oleksandr Syrsky, cité par le centre de presse officiel de l'armée, le groupe paramilitaire russe Wagner, dont les hommes sont en première ligne dans cette bataille, « a envoyé à l'attaque ses unités les mieux préparées, qui tentent de percer la défense de nos troupes et d'encercler la ville ». Le patron de Wagner, Evgueni Prigojine, a revendiqué tour à tour ces dernières semaines la prise de localités autour de Bakhmout, notamment au nord de celle-ci. Soledar est tombée en janvier, puis Krasna Gora en février et, samedi, le village de Iaguidné, situé aux portes mêmes de la ville. Conséquence de cette lente poussée russe, trois des quatre routes permettant aux Ukrainiens d'approvisionner Bakhmout ont été coupées, ne laissant plus comme voie de sortie, que celle menant, plus à l'ouest, vers Tchassiv Iar, au sud de laquelle les Russes essaient également de progresser.

« Nous allons tout récupérer »

Bakhmout a été en grande partie détruite par les combats qui ont provoqué de lourdes pertes dans les deux camps. Le gouverneur de la région de Donetsk, Pavlo Kyrylenko, a révélé à la mi-févier que moins de 5 000 civils, dont environ 140 enfants, restaient toujours en ville malgré le danger.

Les ruines de Bakhmout capturées par les médias russes.
Les ruines de Bakhmout capturées par les médias russes.
/SPUTNIK/SIPA

Les militaires ukrainiens interrogés par l'AFP à Bakhmout lundi ont affirmé garder le moral. « Nous ne pouvons pas connaître toute la situation opérationnelle mais nous sommes ici, nous ne nous sommes pas enfuis », a déclaré un soldat de 44 ans dont le nom de guerre est Kaï. « Pas seulement Bakhmout mais la Crimée et tout le reste, nous allons tout récupérer », a renchéri Ded, 45 ans, en tirant sur une cigarette.

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Fox, 40 ans, est plus réaliste : « Je comprends contre quel pays nous nous battons (...) Ils ont des gens intelligents là-bas, des gens qui savent comment se battre. Ils pensent, ils apprennent, de la même façon que nous ». « Je pense que Bakhmout va probablement tomber », a-t-il lâché, évoquant un manque de munitions et d'effectifs côté ukrainien. Selon le centre de réflexion Institute for the Study of War, la Russie « met en œuvre de nouvelles tactiques d'assaut » en formant des groupes plus petits et plus mobiles.

Drones en Russie

L'état-major ukrainien a signalé des combats sur d'autres points du front : à Koupiansk dans le Nord-Est, à Avdiïvka, près du bastion séparatiste de Donetsk, et à Lyman, une ville de l'est reprise aux Russes en septembre. La Russie a de son côté affirmé mardi avoir abattu pendant la nuit deux drones ukrainiens qui visaient des infrastructures civiles dans le sud de son territoire. « Les deux drones ont perdu le contrôle et ont dévié de leur trajectoire de vol », a assuré le ministère de la Défense.

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Ces affrontements se déroulent après que la guerre en Ukraine est entrée la semaine dernière dans sa deuxième année. Sur le front diplomatique, la Chine est sortie de sa retenue en proposant aux Russes et aux Ukrainiens d'entamer des pourparlers de paix sur la base d'un document en 12 points dans lequel elle exhorte les deux belligérants au dialogue, insiste sur le respect de l'intégrité territoriale et s'oppose à tout recours de l'arme nucléaire. Si les Occidentaux ont globalement accueilli cette intervention diplomatique chinoise avec scepticisme, le président Volodymyr Zelensky s'est dit prêt à « travailler » avec Pékin et a annoncé son intention de rencontrer son homologue Xi Jinping. Le Kremlin a dit ne pas voir « pour l'instant » les conditions réunies pour un règlement «pacifique».

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne