Notre chroniqueur, l'écrivain Kamel Daoud, Prix Goncourt du premier roman 2015 pour « Meursault, contre-enquête », revient sur les liens prêtés entre Lamartine, grande figure du lyrisme et la décolonisation de l'Algérie.
« Ô temps, suspends ton vol ! » Lamartine, un décolonisateur algérien ? Il faut doucement y aller pour expliquer ce petit outrage à la grande figure du lyrisme. D’abord, le poète est français. On le sait depuis les premiers bancs d’école. Ensuite, le beau vers demeure un classique du romantisme : cette envie de tout arrêter de l’usure, de revenir vers l’instant T d’un amour, de surseoir à la vieillesse ou à la séparation, de soupirer après l’éternité est l’éloge de la statique amoureuse. Tout le romantisme s’y retrouve : retourner au moment où l’on a brillé de mille feux et connu mille bonheurs. Finalement, le romantisme, comme le populisme, illustre une angoisse devant le temps qui arrive et une exaltation du temps d’autrefois.