Le président de la République prend-il la mesure de la colère qui s’exprime ? Car elle vient de loin, cette colère, et mérite qu’on la considère. Depuis quarante ans, les Français ont subi une perte de souveraineté politique, budgétaire et commerciale. Peuvent-ils accepter que leur volonté soit une nouvelle fois impunément bafouée ?
Oh, la belle aubaine ! Alors que 70 % des Français restent opposés à la réforme des retraites , alors que la mobilisation , loin de faiblir, s’amplifie face à ce qui est ressenti comme un déni de démocratie – ou à tout le moins une façon légale de la contourner –, la discussion médiatique se focalise désormais sur l’opposition entre violence et ordre, sur fond d’images apocalyptiques. Un mouvement social porté par une majorité de citoyens est présenté comme un blocage du pays par une minorité, et ces grévistes et manifestants sont eux-mêmes assimilés à une infime minorité de gauchistes violents brandissant des slogans anti-flics. La stratégie est classique, éprouvée. Et, pendant ce temps, le président joue l’enjambement : emballé, c’est pesé, la réforme n’a pas été bloquée à l’Assemblée, on passe à autre chose. Les Français sont mécontents ? Ça leur passera. Ils ont d’autres soucis et ils ont la mémoire courte…