Le député de la deuxième circonscription de Paris, ancien président du groupe LREM à l'Assemblée, n'a pas été réinvesti par la majorité présidentielle aux élections législatives. L'éviction de Gilles Le Gendre est un cas exemplaire du destin réservé par la Macronie aux critiques internes. Récit.
Soirée du vendredi 14 juin. C’est un pot de lancement de campagne pluvieux, mais qui se veut heureux. Militants et curieux sont là pour soutenir un candidat qui entend garder son siège aux prochaines élections législatives. Celui de la deuxième circonscription de Paris, qui recoupe ce que la rive gauche a de plus beau à offrir, du Panthéon au Champs de Mars. À cheval entre le 5e, le 6e et le 7e arrondissement. Justement, nous sommes au Sixième, élégant restaurant de l’arrondissement du même chiffre. Voilà plusieurs jours que Gilles Le Gendre doute ; mais Gilles Le Gendre y croit. D’un côté, boule au ventre : le sexagénaire se dit que si son nom de macroniste de la première heure n’est pas sorti dans les premières listes d’investitures, c’est que cela ne sent pas très bon. De l’autre, son credo est de ne pas céder à la paranoïa. Il a donc, quelques heures plus tôt ce vendredi, déposé en préfecture sa candidature. Candidat libre ; on verra bien.
Du sang sur les canapés en velours
Les premiers verres sont servis, et le petit discours de lancement a bien commencé. Jusqu’aux signes de tête et grimaces du directeur de campagne de l’ancien patron du groupe LREM à l’Assemblée, qui doit bien se résoudre à l'interrompre : « Gilles, il faut que tu regardes ton portable… ». Alors, certes, ce n’est pas George W. Bush, à qui il faut apprendre les attentats du 11 septembre 2001 dans une école en Floride. C'est cependant bien une purge, après 8 ans de compagnonnage avec le président de la République. La dernière liste d’investitures de la majorité présidentielle indique que la circonscription de Gilles Le Gendre est livrée à un certain Jean Laussucq, proche de son ennemie jurée : Rachida Dati. L'affront est total : en pleines législatives 2022, encore dans l'opposition, l'actuelle ministre de la Culture avait accusé Gilles Le Gendre d'« harcèlement sexuel et moral » dans un signalement auprès de la procureure de la République. Mais aucune plainte n'avait été déposée, et la justice avait classé l'affaire sans suite.